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Un accent qui sent bon la petite mer, un caractère bien trempé et la fierté d’appartenir à un clan. Entre les Minahouets et les Culs-salés, ça n’a jamais été l’amour fou sans que l’on sache bien pourquoi. Des rivalités de clocher qui font le sel de la péninsule où naviguent aussi les Tudchentil et les Mangeurs d’oreilles !
N’appelez pas un Minahouet un Cul-salé ou un Cul-salé un Tudchentil ou encore un Mangeur d’oreille un Minahouet… Certains ne peuvent pas se voir en peinture mais tous sont pourtant issus d’une même commune, divisée en quatre au cours des derniers siècles. Ils viennent de la rive gauche de Lorient, la Terre Sainte comme on l’appelle, mais pas que pour des raisons religieuses… « Entre Locmalo à Port-Louis et la Trinité Kerner à Riantec, il y avait 26 chapelles, enfin des bistrots quoi ! », nous dit Philippe Le Squer, élu riantécois et passionné d’histoire.
C’est ce qui fait le sel des histoires entre les habitants de la rive gauche. Les femmes qui vont chercher leur pêcheur de mari en brouette, « pour ramener le poisson et le bonhomme », des habitants de caractère, dont le verbe est aussi haut que l’accent est prononcé. Les bistrots, lieu de sociabilisation par excellence. On y passait plus de temps qu’à la maison et cela donnait lieu à quelques bagarres épiques. « Comme dans le bar de Fine Dagorne, à Riantec. Elle était unijambiste depuis la guerre. Quand des bonshommes se battaient dans son bistrot, elle montait sur le zinc, enlevait sa prothèse et les frappait avec ! », rapporte Philippe Le Squer.
Le chupenn mouillé par la marée
Les Riantécois sont surnommés les Culs-salés. On se passerait presque d’explication. Le sobriquet viendrait de la pêche à pied. Les femmes attendaient le dernier moment pour quitter la petite mer de Gâvres, se faisaient donc rattraper par la marée et souillaient leur chupenn, elles rentraient donc… le cul salé ! Pour les Minahouets de Locmiquélic, on est sûrs de rien. Datation, orthographe, signification, c’est assez flou. Tantôt un bateau, tantôt un outil, un ouvrier de l’arsenal voire le surnom du sexe masculin ! « Quand je rendais visite à ma famille de Cul-salé, on disait toujours : « T’es une Minahouet, toi ! » », se souvient Marylis Costevec, du comité d’histoire de Locmiquélic. Ni affectif, ni agressif mais une façon de marquer son appartenance. Car c’est bien le point commun des quatre villages qui composent la terre sainte : la fierté. Certains s’en servent comme un argument de campagne électorale, d’autres auraient dû. « On entend même des citoyens déçus après l’élection dire : « Oui mais bon, c’est un Minahouet » », rapporte Rémy Ropert, du comité d’histoire de Locmiquélic. De mémoire d’habitants, la rivalité entre les Culs-salés et les Minahouets a toujours existé, sans que l’on sache bien pourquoi. Des tensions liées aux clubs de football, aux paroisses. « Des familles se détestent encore aujourd’hui mais ne savent même plus pour quelles raisons », constate Philippe Le Squer.
Camouflet à la Fête des langoustines et mangeurs d’oreille
Véritable institution, la fête des langoustines a démarré à Riantec avant d’être installée à Locmiquélic. Et, il y a quelques années, la reine des Langoustines venait… de Riantec et ça a fait parler dans le bourg ! « Les filles de Locmiquélic ne seraient pas assez belles ? », a-t-on entendu après ce camouflet. « Ça a fait un pataquès », confient les habitants.
Les Minahouets se sont séparés des Culs-salés il y a cent ans, un divorce long où chacune des deux parties revendique la séparation. « Les Riantécois nous disent : « On vous a laissé partir » », sourit Rémy Ropert. La rivalité, non datée, est de bonne guerre entre les deux communes et elle perdure. À l’image de ces jeunes qui lavent leurs combinaisons de kitesurf dans le lavoir de Riantec. « Une femme leur dit : « Vous êtes en train d’envaser le lavoir avec votre sable ».
Ils lui répondent : « T’es même pas une Cul-salé, t’as qu’à demander un lavoir à ta mairie », rapporte, en riant, Philippe Le Squer.
Si la lumière est braquée sur les Minahouets et les Culs-salés, il ne faudrait pas oublier leurs voisins : les tudchentil (Port-Louis) et les mangeurs d’oreille (Gâvres). Les premiers sont littéralement les gentilshommes, les bourgeois, soit tout le contraire des seconds, dont le surnom, pas très affectueux, est hérité d’un match de foot qui aurait mal tourné dans les années 1960. Un footballeur gâvrais aurait croqué le lobe d’un adversaire en plein match… Mike Tyson n’a rien inventé !
July 22, 2020 at 11:00AM
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Les tribus bretonnes (9/36) : Minahouet et Cul-salé, histoire de rivalité en Terre Sainte - Le Télégramme
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salé
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